Gimme blood, Honey

PV Forest & Sybilia

L’aiguille tourne lentement. Une montre à gousset ouverte sous le nez, une tasse de café noir aromatisé à la cannelle dans la main et un journal dans l’autre, cet homme se prépare à aller travailler. Il tapote doucement le mug, le saisissant pour mieux s’en séparer d’une grimace douloureuse. Il revient alors fouiller le journal du regard, reposant sa montre dans une poche pour faire défiler les articles. Un grognement lui échappe de temps à autre, puis il fait signe à une serveuse et lui réclame un stylo. Lorsqu’elle revient, elle lui tend un gros marqueur rouge vif avec un sourire aimable. L’homme s’en empare sans autre réponse qu’un hochement de tête et entoure vivement quelque chose sur son journal, avant de reprendre sa lecture. Il ressort sa montre, quelques minutes plus tard et jette des coups d’œil impatient à la rue adjacente au café. Visiblement non, il ne se prépare pas mais il attend quelque chose, ou quelqu’un. Un soupir trahit son impatience et un retour de sa montre à sa poche montre sa nervosité. Il quitte la rue des yeux pour balayer le café. La serveuse de toute à l’heure discute tranquillement avec une autre, qui arrange les fleurs d’une table un peu plus loin. Elles se sourient, pouffent un peu aussi. Insouciantes, elles filent en cuisine pour filer un coup de main, faute de client à s’occuper. L’impatient homme assis au café reprend sa lecture, entourant avec une sorte de frénésie des articles de son trait rouge avant de les délaisser au profit du café. A petite gorgée, il vide sa tasse pour en savourer les effluves et regarder une nouvelle fois sa montre. L’heure est presque arrivée et ils ne sont toujours pas là.

La porcelaine vide tape sur la coupelle et le type referme son journal d’un geste désinvolte. Il perd son temps, il en est convaincu. Il espérait que le message urgent serait vite arrivé jusqu’aux guildes, mais il s’était visiblement bercé d’illusion. Ils allaient devoir apprendre à faire avec les suceurs de sang en priant pour que … Un éclair roux attire son regard, alors qu’il prend ses affaires. Il reste suspendu aux prunelles vives et au sourire de la jeune femme qui marche vers lui d’un pas rythmé, suivie de près par un très joli loup sombre. Elle lui fait un signe de la main et finalement, il finit par mettre un nom sur son visage alors qu’elle arrive à sa hauteur.

« Bonjour, pardon du retard. Les transports en commun, ce n’est plus ce que c’était. » Avec désinvolture, la rousse se laisse tomber sur un siège et soupire d’aise. « Je suis Misto, d’Eagle’s Claw. Merci de me recevoir, Monsieur Potter. C’est bien vous, je ne me trompe pas ? » Le type hoche la tête, plutôt surpris par cette entrée rapide en matière. Les prières des villageois ont peut-être été entendues, finalement, si l’Impératrice se déplace en personne. « Vous attendez depuis longtemps ?
- Ne vous en faites pas pour ça. Il vaut mieux tard que jamais, et puis ça fait plaisir de voir qu’on nous prend au sérieux. Je veux dire, Sabertooth et Eagle’s Claw ont répondu favorablement… »

Misto reste silencieuse, tandis que l’homme poursuit dans ses banalités. Le nom de Sabertooth tourne un long moment dans son esprit, jusqu’à ce que le mot n’ait plus aucun sens tellement il avait été pesé, étudié et retourner avec minutie. Une lueur de curiosité enflamme son regard et la musicienne tourne la tête vers la rue. Elle ne connait personne de la guilde, même si les rumeurs  courent que des visages célèbres l’ont rejointe récemment. Cette mission, qui s’annonçait bateau et rapide sur le papier, venait de prendre une nouvelle tournure. Lorsqu’une nouvelle personne passe, elle lui adresse un sourire et un vif mouvement de la main.

« Par ici, on n’attendait plus que toi ! »